En France, le document unique, ou document unique d'évaluation des risques (DU ou DUER), a été créé par le décret n° 2001-1016 du 5 novembre 2001. Le décret a transposé la directive européenne sur la prévention des risques professionnels.
L'élaboration et la mise à jour de ce document s'imposent à tout employeur dès le premier salarié. C'est un outil permettant d'engager une démarche de prévention dans la structure et de la pérenniser. Le document unique doit être revu au minimum chaque année et à chaque fois qu'une unité de travail a été modifiée. Il doit également être revu après chaque accident du travail.
Présentation
Le document unique est la transposition, par écrit, de l'évaluation des risques, imposée à tout employeur par le code du travail[]
Le DUER est obligatoire pour toutes les entreprises, administrations et associations ayant au moins un salarié.[. ;.]
L'absence de document unique, en cas de contrôle de l'inspection du travail, peut être sanctionnée de 3 750 euros d'amende et de 9 000 euros en cas de récidive (article 4741-1 du code du travail).
En cas d'accident de travail ou de maladie professionnelle, la responsabilité civile de l’employeur peut être engagée si la faute inexcusable est reconnue, entraînant une réparation du préjudice subi pour la victime (souffrances morales et physiques, esthétiques, …) et pour l'employeur, une cotisation complémentaire en remboursement de la rente majorée servie par la sécurité sociale (SS).
Le décret définit 3 exigences pour le document unique :
- Le document unique doit lister et hiérarchiser les risques pouvant nuire à la sécurité de tout salarié. En ce sens, c'est un inventaire exhaustif et structuré des risques.
- Le DU doit également préconiser des actions visant à réduire les risques, voire les supprimer. En ce sens, c'est un plan d'action.
- Le document unique doit faire l'objet de réévaluations régulières (au moins une fois par an), et à chaque fois qu'une unité de travail a été modifiée. Il doit également être revu après chaque accident du travail.
L'entrave portée à la rédaction et la constitution du DUER peut être sanctionnée par une contravention de cinquième classe (article R 4741-1 du code du travail).
Le document unique n'est donc pas seulement un document légalement obligatoire et figé. C'est un élément essentiel de la prévention des risques dans l'entreprise. C'est un document qui doit vivre.
Exemple : le document unique a mis en évidence un risque majeur dans une unité de travail. Après avoir résolu le problème, le document unique de l'unité de travail est à mettre à jour.
L’intérêt primordial du document unique est donc de permettre de définir un programme d’actions de prévention découlant directement des analyses et évaluations qui auront été effectuées. L’objectif principal étant de réduire le nombre et la gravité des accidents du travail et des maladies professionnelles et ainsi de permettre d'éviter des surcoûts pour la sécurité sociale et pour l'entreprise.
La circulaire n°6 DRT du 18 avril 2002 (non publiée au JO) émise par la Direction des relations du travail (Ministère de l'emploi et de la solidarité) donne des indications visant à fournir des éléments de droit et de méthode utiles pour promouvoir le DU et en faciliter la compréhension[].
Forme du document
Il n'existe aucun modèle imposé. L'employeur est libre d'utiliser tous types de supports (papier, informatique, etc) pour transcrire le résultat de son évaluation des risques. La seule obligation est que ce document soit disponible en un lieu unique que le support soit papier ou numérique.
Pour les grandes entreprises, un document unique doit être établi dans chaque établissement.
Parmi des centaines d'autres modèles, il existe un document créé pour l'industrie de la métallurgie et qui est transposable pour toutes les entreprises.
Accès au DUER
Le document unique doit être tenu à la disposition :
- du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail,
- des délégués du personnel,
- des salariés,
- du médecin du travail,
- de l'inspection du travail,
- des agents des services prévention des organismes de Sécurité sociale,
- des inspecteurs Accidents de travail et Maladies Professionnelles de la Sécurité sociale,
- du Procureur de la République en cas d'accident du travail,
- des organismes professionnels d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, constitués dans les branches d'activité à hauts risques.
En vertu du décret n° 2008-1347 du 17 décembre 2008 paru au JO du 19 décembre 2008, l’employeur doit notamment informer ses salariés que le document unique d’évaluation des risques professionnels est tenu à leur disposition ; il doit également les informer des mesures de prévention des risques identifiés dans le document unique d’évaluation des risques, des consignes de sécurité. De façon générale l’information des salariés sur les risques relatifs à leur santé et à leur sécurité doit être dispensée d’une manière compréhensible et le temps consacré à cette information est considéré comme du temps de travail.
Le Document Unique doit être utilisé pour établir les plans annuels de prévention présentés au Comité d’Hygiène de Sécurité et Conditions de Travail chaque année.
La rédaction du DUER
La responsabilité de la rédaction du Document Unique incombe à l’autorité territoriale. Cela ne signifie pas qu’il le rédige seul ou qu’il peut reporter cette responsabilité à un de ses préposés par lui désigné.
Bien au contraire, comme le précise la circulaire DRT, l’évaluation des risques (transcrite dans le document unique) s’inscrit plus généralement dans la démarche de prévention mise en place dans l’entreprise et à ce titre la rédaction du DU met nécessairement en œuvre :
- une approche pluridisciplinaire (acteurs externes) - le rédacteur s'attache éventuellement les services de professionnels de la Préventions généralistes (CARSAT, OPPBTP, etc.) ou spécialistes, consultants ou intervenant en prévention des risques professionnels attestés (IPRP), qui l'aideront dans cette tâche ;
- l’association des acteurs (internes et externes) - le chef d’entreprise favorisera la participation des personnels, préventionistes, instances représentatives du personnel (CHSCT), médecins du travail, ergonomes, juristes, techniciens, … et les travailleurs eux-mêmes (y compris les travailleurs temporaires), dont la connaissance des risques et l’expérience est un apport indispensable.
Cette approche pluridisciplinaire et participative peut seule :
- permettre une évaluation des risques globale et exhaustive prenant en compte des situations de travail réelles dans l’entreprise,
- et donc conduire à élaborer un document unique qui facilitera ensuite l'élaboration d'un plan d'actions de prévention, lui-même destiné à supprimer ou réduire les risques.
Le Document Unique n’est qu’un élément de la démarche de prévention, processus cyclique qui comporte cinq étapes :
- étape 1 : Préparation de la démarche (se donner les moyens, les méthodes, les objectifs, …),
- étape 2 : Évaluation des risques (et rédaction du DU),
- étape 3 : Élaboration du programme d’actions de prévention,
- étape 4 : Réalisation des actions planifiées,
- étape 5 : Réévaluation des risques suite aux actions menées,
- … et recommencer un nouveau cycle …
Exemples d'évaluations des risques
Pour chaque poste ou unité de travail, l’entreprise doit identifier :
- Les dangers (ex : vitesse excessive).
- Les risques (ex : risque routier).
- Les conséquences (ex : accident).
- Les causes (ex : non-respect du code de la route).
- L’estimation de la gravité du risque (ex : élevé, faible, moyen).
- L'estimation de la fréquence et de la durée d'exposition (ex : temps de conduite).
- Les mesures de prévention (ex: note de service sur les dangers de la route).
Il est également fortement recommandé de faire une évaluation de la gestion du stress et des risques psychosociaux.
Risques et actions de prévention
Des exemples de risques :
- risque routier ;
- risque lié à l’utilisation d’un téléphone portable : accident ;
- rachialgies (changement de roue, chaînage, posture liée à la conduite) ;
- pollution urbaine et gaz d'échappements ;
- agressions physiques et verbales ;
- station assise prolongée, contraintes circulatoire, digestive ;
- chute de hauteur, de plain-pied (neige, verglas) ;
- charge mentale (vigilance permanente) ;
- climatisation.
Des exemples d’actions de prévention :
- respect de la réglementation des temps de conduite et des temps de repos : archivage des disques de chronotachygraphe ;
- ergonomie du poste de conduite (siège adapté réglable, protection éventuelle contre les agressions physiques, …) ;
- entretien mécanique, pneumatique, électronique, régulier du véhicule ;
- choix de l'itinéraire ;
- danger de l'utilisation de médicaments et de drogues ;
- respect du code de la route ;
- visites médicales périodiques.
Risques et actions de prévention concernant le personnel administratif
Des exemples de risques :
- travail sur écran en permanence avec contraintes visuelles et posturales ;
- gestes répétitifs lors de la frappe sur le clavier ;
- manutention de dossiers pour consultation, mise à jour, archivage ;
- pression des clients ;
- bruit du téléphone ;
- nuisances organisationnelles : travail pouvant connaître des périodes plus intenses que d'autres ;
- agressions verbales téléphoniques ;
- risque incendie ;
- travail en périodes de fortes chaleurs ;
- harcèlement moral, harcèlement sexuel.
Des exemples d’actions de prévention :
- en cas de travail sur écran, examen approfondi des yeux lors des visites médicales ;
- comportement adapté aux agressions verbales ;
- réglage de la luminosité ;
- écran de bonne qualité, antireflet, nettoyé régulièrement ;
- organisation du temps de travail ;
- suppression du tabagisme passif ;
- gestion des pauses et alternance des tâches ;
- affichage de consignes concernant le harcèlement moral ;
- dialogue ;
- rappeler les postures à adopter devant son écran, utiliser un tapis de souris adapté au poignet ;
- extincteurs.
Risques et actions de prévention concernant le mécanicien
Des exemples de risques :
- bruit des moteurs et des outils ;
- produits gras, salissants ;
- odeurs ;
- rejets des pots d'échappement ;
- coupures ;
- chutes de plain-pied sur sol glissant, mal éclairé, encombré ;
- lombalgies d'effort ;
- projection de corps étrangers dans les yeux ;
- port de charges (pièces détachées, batteries, outils) ;
- gestes répétitifs des poignets pour le montage et démontage des pneus (vissage).
Des exemples d’actions de prévention :
- aération et ventilation du local, chauffage et éclairage suffisants ;
- produits dangereux étiquetés ;
- outils en bon état et adaptés à la tâche ;
- extincteur à proximité ;
- connaissance de la signalisation de sécurité et des symboles présents sur les récipients par le personnel ;
- interdiction de boire, de manger et de fumer dans l'atelier ;
- consignes de sécurité et procédures d'évacuation affichées ;
- mise à la terre des appareils électriques, prises de courant protégées ;
- réduction du bruit à la source ;
- port de protection individuelle ;
- réseau électrique aux normes et régulièrement contrôlé (installation, câbles, prolongateurs, …) ;
- évacuation adaptée des gaz, fumées, vapeurs explosives.